Vie blindée

Hasard malheureux de l'actualité, Canal + entamait ce soir la diffusion de Gomorra, une série italienne adaptée du roman éponyme de Roberto Saviano.

Soit une âpre descente dans les entrailles de la Pieuvre, dans l'univers glacé, glaçant et ultraviolent de la Mafia napolitaine, la Camorra.

Les deux premiers épisodes installent le téléspectateur au coeur du dispositif d'un clan mafieux où se dessinent déjà les luttes de pouvoir à venir.

Derrière notre écran, dans l'instable position du voyeur gourmand, on s'enfonce, honte et excitation mêlées, dans ce long voyage au bout de la nuit.

Très vite, on s'abandonne comme un raver à la trance ...

On lâche prise, emporté par le flux cinétique, les boucles opiacées du son de Mokadelic et l'étrange perversité charnelle de cette fiction chargée à bloc de la téstostérone du réel.

Si loin, si proche ...

On ne se pose pas la question, on sait que de toute façon, un jour, demain, l'une rattrapera l'autre, ou l'!nverse.

Alors, on regarde...

On scrute les tueurs à l'oeuvre ...

Après. Avant.

Bons pères de famille, amants attentionnés ...

L'oeil mouillé lorsqu'ils observent leurs enfants jouer.

Les balles claquent, le sang gicle ... Orphelins, veuves, du Code d'honneur ... Tombés pour ... la cause ...

Enfin, cause toujours ...

Entre drogue et autres trafics, ils ne flinguent et ne se font flinguer que pour le chef, celui qui donne les ordres.

Hasard malheureux de l'actualité, Gommora nous renvoie à ces autres tueurs ...

Pas seulement par leur froide violence, mais parce que la Mafia, elle non plus, ne supporte pas la liberté d'expression.

Depuis 2007, année de la sortie de son livre, Roberto Saviano vit sous protection policière permanente.  La Camorra a condamné à mort ce journaliste italien, coupable d'avoir brisé la loi du silence, dénoncé le "cancer" de la Mafia au niveau mondial.

A 36 ans, Roberto Saviano tente, sans trop de regrets, de résister, d'exister dans ce qu'il appelle sa "vie blindée" .

See You Later !!!

D.